Bonjour à tous,
De tout temps, les auteurs de SF ont imaginé un avenir dans lequel la frontière entre l’homme et la machine serait de plus en plus fine. Si bien que les récentes avancées fulgurantes dans les domaines de l’intelligence artificielle et de la robotique nous font parfois nous demander si la réalité ne rattraperait pas la fiction. Mais pour Sophie Zimmermann, le futur de l’humanité ne dépend pas de robots, mais d’elle-même. À condition de se débarrasser de nos émotions.
Lignées est le tout premier roman de cette jeune auteure. Sorti début février 2019, il est publié en autoédition chez Publishroom.
Je tiens à remercier l’auteure pour cette belle découverte.
Pour quels lecteurs ?
– Ados-adultes
– Adeptes de SF
– Personnes rencontrant des problèmes dans la création d’univers SFFF
L’intrigue
Ava vit dans un monde bâti grâce à la fusion cellulaire définissant des Lignées d’individus aux caractéristiques particulières. Dans cette société où les émotions sont atténuées et les contacts corporels inexistants, un équilibre semble régner entre les êtres humains. Un idéal auquel croit la professeure, jusqu’au jour où un groupe armé fait irruption dans sa classe et la kidnappe. Peu à peu, les révélations s’enchaînent et l’illusion s’estompe. L’utopie n’était qu’une façade ; un projet d’extermination est en marche, et Ava se retrouvera rapidement embarquée dans une bataille pour assurer l’avenir de l’humanité.
Mon avis
À première vue, ce roman s’inscrit dans une veine plutôt classique de la SF : une société d’individus formatés, une héroïne qui va jouer le rôle du grain de sable dans la mécanique parfaitement huilée et surtout, l’enjeu suprême, la sauvegarde de l’humanité. Rien que ça.
Ça y ressemble un peu, mais ne vous y trompez pas. Ce roman est tout sauf du réchauffé.
En effet, et son plus gros point fort n’est autre que son univers. Productivité, rentabilité, sécurité, plein emploi, le futur selon Sophie Zimmermann ressemble à un savant mélange d’enjeux politiques et entrepreneuriaux actuels. Ajoutez-y une high-tech aussi indispensable qu’omniprésente et Poussez le tout à l’extrême. Vous obtiendrez une société docile qui n’a de raison d’exister que pour son propre développement. Conditionnés depuis la naissance, les individus insensibles ne s’épanouissent qu’à travers la pérennité de ce modèle.
Un peu comme un état totalitariste, mais à l’échelle planétaire et sans dictateur. Ou comme la société robotisée, sauf que ses citoyens sont encore des hommes. Vous voyez le genre ?
Très vaste et en rupture totale avec notre monde, cet univers ne couvre rien de moins que la vie quotidienne, l’éducation, le travail, la vie amoureuse, la politique, la hiérarchie sociale, les loisirs, et même les langues vivantes. En plus de penser à tout et de nous offrir une immersion totale dans son univers, elle le rend ludique et le place à portée de tous. Ici, pas besoin de s’y connaître en SVT pour percer les secrets du séquençage de l’ADN. En fait, tout au long du roman, Sophie Zimmermann utilise de nombreux passages comme prétextes pour nous expliquer progressivement les différents aspects de son univers et ses enjeux. En parallèle, elle utilise un second procédé qui a fait ses preuves dans ce type de situation : l’étrangement. Malheureusement, je ne peux pas vous l’expliciter en détail sans spoiler. Je vous invite donc le lire pour découvrir le pourquoi et le comment de son utilisation.
« Étant enfant, les Éleveurs nous instruisaient en nous montrant les divers objets utilisés à chaque époque. Encore une fois, je fis appel aux connaissances qu’ils m’avaient transmises. En posant mes pieds nus sur le sol, la température me saisit. Je ne connaissais pas cette matière, elle transmettait le froid et l’humidité ambiante. Après quelques hésitations pour faire fonctionner la douche, je réussis à me laver. »
Passons, à présent, aux personnages.
Ce roman compte une vingtaine de personnages actifs, tous niveaux confondus. Un nombre relativement élevé pour un tome unique. Hyper réalistes, ils sont avant tout tous très différents les uns des autres (comme quoi, la fusion préserve quand même l’individualité) et travaillés en profondeur. L’auteure met également l’accent sur les relations sociales, dans toute leur complexité, faisant émerger aussi bien des quiproquo que des scènes comiques ou bien dramatiques. De ce fait, on s’y attache assez facilement (même aux plus ingrats) et le côté « panel » permet de s’identifier à plusieurs d’entre eux au fil des chapitres. Comme quoi, « société standardisée » ne rime pas forcément avec « déshumanisée ».
Attaquons-nous à présent au style. Sur la forme, ce roman de 338 pages est composé de chapitres réguliers en taille et subdivisés en sections plus ou moins courtes par ces fameuses petites étoiles. À cela, il faut ajouter de nombreux cliff hangers, à l’intérieur comme à la fin des chapitres. Tout ceci contribue largement à un rendu fluide et à accroître son potentiel addictif.
Les descriptions, sont très imagées et vous garantissent une immersion totale dans le monde de l’auteur. Malheureusement, certaines d’entre elles sont irrégulières en terme de qualité. En effet, certaines descriptions de combat ne sont pas assez détaillées, si bien qu’on ne se rend pas bien compte des enchaînements. Pour d’autres, il s’agit en revanche de maladresses qui nuit ponctuellement à la fluidité d’un passage.
Ce qui nous amène à ses imperfections, car il y en a. Outre les coquilles et aux erreurs de syntaxes, on retrouve des lourdeurs de style et de trop nombreuses occurrences des verbes être et avoir. Une bonne relecture s’impose donc, histoire de faire disparaître ces défauts.
Le Verdict
En résumé, Lignées est, dans l’ensemble, un excellent roman de SF et il ne lui manque qu’une révision supplémentaire pour être parfait.
Dans son primo roman, Sophie Zimmermann dépeint une société qui a su se réinventer et éradiquer les problématiques majeures (chômage, dérèglement climatique, insécurité…) sans tomber la société espionne à la Big Brother ni dans l’utopie « feel good ».
Fluide et mouvementée, l’intrigue laisse à peine le lecteur souffler que déjà, de nouvelles péripéties ou révélations pointent le bout de leur nez. Le danger, lui, est omniprésent et va crescendo, nourrissant le suspense au fil des chapitres jusqu’à la révélation finale.
Bref, cette œuvre vous happe et ne vous lâche pas avant la dernière page. Pour ma part, je l’ai littéralement dévorée en une semaine à peine.
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